Avec l'association Danse à Tous les Etages, on danse pour apprendre à vivre autrement. Le projet Créatives est destiné aux femmes en insertion socioprofessionnelle ; Portraits en Mouvement doit permettre à des jeunes de 16 à 25 ans de se remobiliser sur un projet professionnel ; Corps Sensibles, lui, s'adresse aux retraités.

L'édition 2015, qui vient de s'achever à Rennes, a pris des contours un peu différents des autres années. Le partenariat avec le centre de prévention « Bien vieillir » Agirc-Arrco Bretagne a permis de toucher des personnes plus jeunes, entre 60 et 70 ans, qui finalement étaient peut-être plus motivées par la danse que par l'envie de rompre leur solitude.

 

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Corps Sensibles, une dénomination poétique pour évoquer cet âge où le corps répond plus difficilement aux sollicitations qu'il reçoit. Celles et celui qui ont mené à bout les trois mois du projet et atteint le work-shop proposé en clôture le 16 juin au Garage, n'adhèrent pas tous à cette notion de fragilité. Si Henri, l'homme qui « jongle avec les mots » dit avoir été attiré dans un premier temps par cette « jolie formule », Monique et Claudine, elles, préfèrent l'ignorer. « Je n'ai pas fait attention à ça – dit la première – pour moi, c'était d'abord une expérience de créativité. » « Moi, je venais juste pour affiner des sensations – déclare la seconde – parce qu'au niveau du corps, je ne ressens pas encore la vieillesse. » Maguy, en revanche, dont « certaines partie [du] corps sont fragiles » a précisément voulu savoir « comment [son] corps pouvait encore bouger. »

Des personnes moins âgées, moins dépendantes

A l'heure du bilan du projet 2015, Malika Teneur, coordinatrice de l'association Danse à Tous les Etages, reconnaît que les participant-e-s de cette année sont un peu différent-e-s des années passées. En effet, de 2009 à 2013, le projet s'est déroulé à la Maison de Retraite du Gast alors que l'édition qui s'achève, en partenariat avec le centre de prévention, s'ouvrait à des personnes moins âgées et moins dépendantes. « L'objectif – explique-t-elle – était de créer du lien, de travailler sur la sociabilité avec des personnes pouvant souffrir d'isolement en début de retraite. »

Objectif partiellement atteint, si l'on en croit les profils des dernier-ères participant-e-s. Au début de l'atelier, des femmes aidantes, accompagnées par le CCAS du Blosne se sont effectivement inscrites, mais leur manque de disponibilité lié à la présence à domicile d'un mari malade, ne leur a finalement pas permis d'adhérer au projet.

 

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« Au final – constate Malika Teneur – on retrouve des personnes qui ont déjà eu une pratique artistique, qui sont déjà ouvertes à la danse contemporaine. La proposition de la chorégraphe Emmanuelle Huynh de retravailler sa pièce « Crible » avec beaucoup d'improvisation fait que ne sont allées jusqu'au bout que les personnes les plus à l'aise. » Un changement de cap, donc, pour ce projet qui n'augure pas de ce que sera le Corps Sensibles 2016. « Ça dépendra aussi des intervenants, des propositions des chorégraphes et des personnes que l'on touchera » résume Malika Teneur.

De la poésie et des couleurs dans la vie

Du côté du plateau de danse, les résultats sont bien là. « Depuis que je suis à la retraite, mon principal objectif est de me re-traiter, de prendre soin de mon corps ; ça m'a permis de le rendre plus vivant ! Je voulais aussi sortir de mon cocon habituel, voir des gens, échanger » s'enthousiasme Claudine qui apprécie d'avoir « bénéficié de l'écoute et de la délicatesse » de la chorégraphe, Emmanuelle Huynh, et du danseur professionnel, Nuno Bizarro, qui animaient l'atelier et lui ont permis de travailler une pièce « déjà dansée par des professionnels dans différents pays ». « Ça met -dit-elle en conclusion – un peu de poésie et de couleurs dans la vie ! »

Même enthousiasme chez Catherine, déjà adepte de la danse, qui assure : « la danse est un moyen de sortir de moi et ça fait du bien ; ça me donne une autre image. » Monique aussi, avait déjà pratiqué la danse et l'expression corporelle, et a « particulièrement apprécié de pouvoir travailler avec un danseur professionnel. »

Quant à Henri, le seul homme de la bande, il a choisi le ton de l'humour pour assurer que « pour vieillir vraiment bien, il vaut mieux commencer tôt ! » Profitant de la pause après la répétition, il a étalé quelques livres devant lui et se prête au jeu des dédicaces. L'œil plein de malice, il confie à propos de ses camarades d'atelier : « elles vont apparaître dans mon prochain livre ! »

Geneviève ROY