Il y a du travail dans l'agriculture, des emplois restent non pourvus et rappelons-le, la Bretagne est la première région agricole de France.

A l'occasion de Métiers en Tous Genres, quinzaine de la mixité professionnelle en Bretagne du 4 au 12 décembre, la Chambre d'Agriculture et la Maison de l'Emploi de Rennes ont souhaité mettre l'accent sur des « métiers agricoles accessibles à tous et toutes ».

Après la visite d'une ferme bio et la découverte du maraîchage, c'est de machinisme agricole qu'on a parlé mercredi après-midi. Cécilia, qui prépare son bac pro, est venue témoigner.

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 La MFR La Rouvraie à Montauban de Bretagne affiche fièrement ses 98% d'insertion professionnelle réussie à l'issue des formations dans l'agroéquipement ou la maintenance de matériels agricoles ou de travaux publics. Pourtant, sur les 350 élèves de la 4ème au BTS, elle ne compte que deux filles. Dans sa classe de Terminale, Cécilia est seule au milieu de vingt-huit garçons.

Aujourd'hui, elle s'amuse de la rivalité qui existe entre ceux qui se destinent à la mécanique et ceux qui apprennent à conduire les engins, ceux dit-elle qui « cassent » et ceux qui comme elle, « tournent des boulons toute la journée » ! Mais pour en arriver là, à quelques mois du bac professionnel, la jeune fille a du faire preuve de beaucoup de ténacité.

Elle se souvient de son entretien en classe de 3ème avec une conseillère d'orientation qui lui assurait que le métier de ses rêves « n'existait pas » : « je n'ai pas réussi à lui faire comprendre en deux heures d'entretien que c'était un "vrai" métier ! »

Moins de force, mais plus de stratégie

Il en faudrait plus pour décourager Cécilia, fille et petite-fille d'agriculteurs normands. « Mon père – raconte-t-elle – a fait un CAP de mécanique automobile, donc, ses tracteurs, ils les entretient lui-même. Et comme j'ai toujours passé beaucoup de temps avec lui à la ferme, la passion m'est venue aussi ! » Depuis le début de son apprentissage, Cécilia en a vu passer de toutes sortes : machines de récoltes, tracteurs, semoir, moissonneuse, etc. ; plus aucune machine agricole n'a de secret pour elle ! Les seules conditions de réussite à ses yeux : aimer ça et « ne pas avoir peur de se salir ! »

Apprentie dans une première entreprise, Cécilia a choisi d'en rejoindre une autre cette année, à cause dit-elle du « côté macho et sexiste » de ses collègues. « Entre les deux entreprises – explique-t-elle – le côté féminin n'est pas vu de la même manière. Là où je suis maintenant, je fais partie intégrante de l'équipe ; je suis une fille mais je suis capable de faire comme les autres. Même s'ils sont conscients qu'il y a des choses que je ne peux pas porter, il n'y a aucune discrimination ! Avant, mes autres collègues ne me faisaient pas confiance parce que j'étais une fille et que j'avais moins de force !»

ceciliadirmfrSi elle reconnaît manquer parfois de force physique, Cécilia dit compenser par « des astuces » et par « la pensée » ! Elle utilise davantage les chariots, les grues d'ateliers et développe des stratégies dont finalement les autres profitent aussi par la suite.

Entreprises cherchent femmes compétentes

« Mes collègues me disent que ça leur fait du bien d'avoir une fille dans l'équipe – dit encore la lycéenne – ça leur permet d'échanger davantage, de s'ouvrir ! » En tout cas, si l'on en croit le directeur de la MFR de Montauban de Bretagne, « les entreprises sont à la recherche de femmes pour étoffer leurs équipes et à compétences égales une fille sera souvent préférée à un garçon. »

Ce fut le cas de Cécilia quand elle a changé d'employeur. « J'ai eu la chance – dit-elle – d'avoir le poste alors que j'avais un garçon en face de moi. » Mais rajoute-t-elle aussitôt : « ils avaient déjà eu une histoire qui s'était mal terminée avec une autre fille, alors ils m'ont dit : on t'embauche, mais il ne faut pas nous décevoir ! » Aurait-on dit la même chose à un garçon, s'interroge Cécilia qui se console quand elle entend des clients demander à son patron : « mon nouveau tracteur je veux que se soit ton apprentie qui le prépare et pas un garçon ! »

Une fois le bac en poche, Cécilia rejoindra le bureau d'études d'un constructeur pour préparer son BTS en alternance. Elle se verrait bien devenir inspecteur technique ou formateur technique ; des mots qui semble-t-il n'existent pas encore au féminin !

Geneviève ROY

Pour aller plus loin :
Journées Portes Ouvertes à la MFR La Rouvraie les samedis 31 janvier 2015 de 9h à 12h et 14 mars 2015 de 9h à 18h. Plus d'infos sur le site