Nos mères et grands-mères le savaient bien ; on le leur avait appris. Souffrir quand on est femme est quasi naturel. Il faut souffrir pour être belle ; il faut souffrir pour donner la vie... Nombre d'entre elles, nombre d'entre nous encore aujourd'hui, ont subi ou subissent leurs règles douloureuses comme une fatalité. Et pourtant !

S'il s'agissait plutôt d'une « vraie » maladie. L'endométriose encore trop peu connue, et surtout trop peu reconnue par les laboratoires et les chercheur-e-s, est une maladie chronique aux conséquences graves. Des conséquences pour la santé physique ou psychologique, la stérilité notamment ; ou des conséquences sociales comme les absences répétées au lycée ou au travail.

A Rennes, deux jeunes femmes concernées ont décidé de prendre les choses en main pour permettre à toutes celles qui le souhaitent de trouver un lieu de parole et d'échange, voire d'actions, pour défendre leurs droits à être prises au sérieux.

 

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« L'endométriose est une maladie chronique inflammatoire très handicapante » résume Manon Carbonnel évoquant ces « micro hémorragies » qui s'insinuent dans tout le corps. « C'est un peu comme une toile d'araignée qui bloquerait les organes entre eux » ajoute-t-elle. Et chiffres à l'appui, elle décrit cette maladie responsable dit-elle de 50% des cas de stérilité féminine en Europe. Entre une femme sur sept et une femme sur dix en âge de procréer en souffrirait aujourd'hui ; « c'est énorme - dit-elle encore – ça touche autant de femmes que le diabète ! »

Pourtant, parler de sa maladie lorsque l'on en est atteinte, et même obtenir des informations, reste un parcours de la combattante. « On nous dit que c'est normal d'avoir mal ; que souvent, les douleurs sont dans la tête, que c'est psychologique ; ce qui est faux ! -s'emporte la jeune femme -Toutes les règles douloureuses ne sont pas de l'endométriose, mais beaucoup le sont ou peuvent le devenir. Et cette maladie est connue depuis longtemps ! »

Trouver un médecin "ouvert à l'idée !"

Alors pourquoi n'existe-t-il aucun traitement ? Parce que répond Manon Carbonnel « c'est une maladie de bonnes femmes ! » Une façon de dire qu'elle n'intéresse pas les chercheur-e-s. Et une bonne raison pour Manon Carbonnel et Marianne Flahou, toutes deux concernées, de vouloir constituer un groupe de parole à Rennes. Parce que au moins, entre elles, les femmes pourront s'écouter, se confier et échanger quelques conseils ou bonnes adresses. Notamment, dit-elle, celles « de médecins ouverts à l'idée ».

Il faut entre cinq et dix ans pour poser un diagnostic sur l'endométriose. « Ça laisse le temps à la maladie de s'installer, de proliférer – explique Manon Carbonnel – et souvent les femmes la découvrent parce qu'elles n'arrivent pas à avoir d'enfants. »

Alors qu'un dépistage peut être fait et que dans certains cas des opérations peuvent être envisagées. « Je pense – dit Manon Carbonnel – que l'un des enjeux est de faire connaître la maladie pour que les jeunes filles se fassent dépister très tôt, quand les règles apparaissent. Plus tôt on s'attaque à la maladie mieux c'est ! »

L'importance de l'aspect psychologique de la maladie 

Elle s'était réjouie d'une campagne nationale auprès des personnels éducatifs au collège et au lycée annoncée par Najat Vallaud Belkacem, alors ministre de l'Education, mais se désole que les choses n'aillent pas plus vite compte tenu des absences nombreuses et répétées qu'entraînent les douleurs liées à l'endométriose ; elles sont handicapantes pour les collégiennes et les lycéennes, mais le deviennent souvent encore plus dans le monde du travail.

Manon Carbonnel et Marianne Flahou ont reçu pas mal de soutien, notamment du Planning Familial. Si elles ne savent pas encore quelle forme prendra leur initiative, elles savent que l'intérêt est grand.

Sans doute faudra-t-il envisager la création d'une association et trouver un local pour abriter les groupes de parole qui pourraient se constituer sur différents thèmes : la grossesse et l'accouchement, l'opération, etc. Très peu d'associations existent actuellement sur l'endométriose. Et les deux jeunes Rennaises croient savoir qu'elles agissent plutôt en direction des institutions et des laboratoires mais sont peu en contact direct avec les malades ; alors que « l'aspect psyhologique est important » estime pour sa part Manon Carbonnel. Une motivation supplémentaire pour poursuivre leur projet.

Geneviève ROY

Pour avoir plus d'informations : contacter le Planning Familial 35 qui fait le lien avec le groupe de parole.