Avec ses journées de rentrée, l'ARACT Bretagne a voulu mettre l'accent sur l'obligation faite aux entreprises de favoriser l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Une occasion de se dire que s'il reste beaucoup à faire, des évolutions sont tout de même manifestes. A la SNCF, venue témoigner le 24 septembre à Rennes, plus d'hommes que de femmes choisissent de travailler à temps partiel.

L'heure de la rentrée a sonné à l'ARACT Bretagne en matière d'égalité professionnelle. Quatre journées de réflexion ont été programmées pour la région en septembre (le 10 à Brest, le 24 à Rennes et le 25 à Vannes) et octobre (le 10 à St Brieuc). L'objectif de ces journées : donner des repères aux entreprises pour agir en faveur de l'égalité professionnelle hommes/femmes, rappeler la réglementation et présenter les ressources disponibles.

Les bretonnes travaillent plus

Quelques constats s'imposent tout d'abord. En termes d'emploi, les inégalités hommes/femmes sont encore bien réelles en France. Bien qu'elles soient plus diplômées, les femmes accèdent moins facilement que les hommes aux postes les plus qualifiés ; 9% sont cadres contre 13% d'hommes.
Les femmes exercent dans des secteurs moins rémunérateurs tels que l'industrie agro-alimentaire, le commerce ou la restauration et travaillent également plus souvent que les hommes à temps partiel (37% contre 7%). Elles occupent plus souvent des emplois précaires ; 25% seulement sont en CDI à temps plein contre 43% des hommes. Enfin, au niveau de la rémunération, les femmes touchent 25% de salaire brut en moins et à type d'emploi égal, elles restent payées 6% de moins que les hommes sans que cet écart trouve d'explication.
Les chiffres de la Bretagne ne sont pas éloignés des chiffres nationaux même si la région peut s'enorgueillir d'un taux d'accès à l'emploi plus élevé pour les femmes (61,3% contre 59,9%).En 2009, en Bretagne, une femme touchait un salaire moyen mensuel de 1731€ quand un homme percevait 2308€. Autrement dit, il faudrait qu'une femme travaille un trimestre de plus pour atteindre à la fin de l'année le même salaire qu'un homme.
D'autres inégalités persistent notamment en matière de santé au travail. Entre 2006 et 2010 si le nombre d'accidents du travail a baissé de 8% chez les bretons, il a augmenté de 6% pour les bretonnes.
Autant de chiffres qui démontrent s'il fallait encore convaincre que les dispositifs visant à réduire les inégalités professionnelles n'ont pas atteint leurs objectifs malgré les nombreuses lois mises en place au fil des années.
Ainsi, malgré l'obligation de négocier un accord d'égalité professionnelle - ou à défaut de mettre en place un plan d'action - dans chaque entreprise quels que soient ses effectifs, seulement 475 dossiers ont été déposés en Bretagne soit 25% des entreprises assujetties. Les autres s'exposent à des pénalités qui pourraient d'ailleurs être prochainement durcies par la nouvelle loi sur l'égalité ; grâce au volontarisme affiché du ministère des droits des femmes, des mises en demeure sont adressées régulièrement aux entreprises les plus récalcitrantes.

La SNCF déjà mobilisée

A titre d'exemple, l'ARACT avait invité pour sa session de Rennes une entreprise pionnière en la matière : la SNCF.
Marie-Hélène Busson, chef de projet diversité à la direction des ressources humaines de la SNCF, a retracé le parcours de son entreprise qui malgré un taux de féminisation encore réduit - 19,6% pour la France, 19,8% en Bretagne - a mis l'égalité professionnelle au cœur de sa politique depuis déjà plusieurs années.
« En tant qu'entreprise nationale – rappelle Mme Busson – la SNCF se doit de montrer l'exemple pas pour dire qu'elle est plus forte que les autres mais parce qu'elle est plus visible. Avec 156 000 collaborateurs, la SNCF est comme un échantillon de la population française. Il y a aussi des hommes qui ont du mal à faire de la place aux femmes et des femmes qui n'osent pas prendre les places de cadres. Depuis avril 2013, nous nous sommes aussi engagés à communiquer auprès des différentes entreprises avec lesquelles nous travaillons pour leur dire : et vous, qu'est-ce que vous faites pour l'égalité hommes/femmes ? »
Un certain nombre d'actions ont pu être mises en place par la SNCF depuis la signature du premier accord en 2006 notamment des formations de managers destinés à lutter contre les stéréotypes lors des recrutements et des supports transmis aux équipes.
« La mixité professionnelle est un levier d'innovation – assure Marie-Hélène Busson avec beaucoup de conviction – Quand on se dit qu'on est à 19,6% de féminisation alors que les femmes représentent 51,6% de notre société, on voit bien qu'on se prive de talents. Par ailleurs, une étude a montré que ce sont majoritairement les femmes qui achètent des billets de train ; quand on transporte dix millions de voyageurs chaque année, comment répondre aux besoins d'une acheteuse si on n'a pas de femmes dans l'équipe ? Les femmes, sont aussi un atout business ! D'autre part, on est conscient que les femmes ont aujourd'hui des retraites plus petites que les hommes, comment fait-on pour que nos salariés ne rencontrent pas les mêmes problématiques demain ou après-demain ? »

Un nouveau dispositif en décembre

« L'égalité professionnelle, c'est aussi pour les hommes » dit encore la responsable de la SNCF qui rappelle qu'eux aussi sont contents de pouvoir « rentrer chez eux à 18h 30 et de ne pas avoir de réunions à 7h du matin ». En Bretagne, on compte 700 cheminotes. Si deux d'entre elles sont conductrices de train, on peut cependant noter que les femmes travaillent essentiellement dans des domaines traditionnellement féminins : 95% du personnel paramédical mais seulement 3,6% pour les métiers de l'infrastructure. En revanche, il faut aussi noter qu'en chiffres réels – et non pas en pourcentage - plus d'hommes que de femmes sont aujourd'hui en temps partiels choisis. Et sur les 187 hommes concernés, près de 50% déclarent avoir choisi ce mode de travail pour élever leurs enfants.
Devenue « territoire d'excellence » depuis la signature de la convention avec l'Etat en décembre 2012, la Bretagne est région expérimentale en matière d'égalité professionnelle, de retour à l'emploi après un congé parental et de mixité des métiers. Dans ce cadre, l'ARACT a été désignée pour mettre en place un nouveau dispositif afin d'accompagner les entreprises de moins de 300 salariés ; les clusters égalité débuteront en décembre. Si la SNCF montre la voie, tout est encore possible pour les autres entreprises régionales qui sont invités à prendre le train en marche.

Geneviève ROY