Le passé était convoqué ce jeudi devant un amphi de près de 350 lycéennes. Entre archives de l'INA et détour par l'Histoire pour évoquer quelques femmes scientifiques (si,si, il y en a!) ça ne se passait pourtant pas à la fac d'Histoire mais dans les locaux de l'INSA de Rennes.

Et c'était bien d'avenir qu'il était question, celui des élèves de première et terminale S de 22 lycées bretons ; des élèves au féminin auxquelles on souhaitait faire entrevoir l'intérêt des métiers de l'ingénierie.

 

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Ce n'est plus un mystère pour personne : les filles pourtant plus nombreuses que les garçons dans les filières scientifiques au lycée, et obtenant de meilleurs résultats, disparaissent en grand nombre à l'heure des inscriptions en grandes écoles préparatoires ou en formations techniques et scientifiques.
La journée du 27 février organisée par l'INSA et le rectorat en partenariat avec trois entreprises (ATOS, Orange et Eurovia-Vinci) avait un double objectif : faire prendre conscience aux futures bachelières qu'elles ont leur place dans les métiers d'ingénieur-e et à travers les exemples concrets d'entreprises leur montrer les emplois auxquels elles pourraient prétendre mais aussi leur présenter les formations proposées par l'INSA de Rennes qui souhaite augmenter la féminisation de ses effectifs. Pour l'année 2014, sur les 1700 étudiants en formation, à peine 25% sont des filles.
De Saint-Malo à Vannes, de Lanester à Dinan ou Ploermel en passant par Brest et Bruz, les lycéennes sont venues remplir l'amphi D de l'INSA plus habitué donc à un public largement masculin. Fabienne Nouvel, chargée de mission égalité/diversité de l'INSA, se réjouit de cette « première journée d'une telle ampleur en France » et rappelle le maître-mot de la journée : oser.

Couches culottes et BTP

Le message de Nicole Guenneugues, chargée de mission égalité au rectorat, ira dans le même sens. Nommer des hommes scientifiques, c'est facile, rappelait-elle, mais qu'en est-il des femmes ? « Heureusement, nous avons Marie Curie, première femme Prix Nobel ! » s'amusait-elle avant d'en évoquer trois autres, moins connues, certes, mais tout aussi méritantes. Sophie Germain, « mathématicienne à une époque où l'on n'enseignait même pas les mathématiques aux filles », Ada Lovelace considérée comme la première programmatrice informatique et Clémence Royer, traductrice en français de Darwin.
Des modèles pour toutes celles qui penseraient que la science est réservée aux hommes. Et chiffres à l'appui, Nicole Guenneugues poursuivait son exercice de motivation. En bac S, 46% des élèves sont des filles (contre 54% de garçons) mais 91% d'entre elles obtiennent leur diplôme (32% avec une mention bien ou très bien) contre 88% des garçons (dont 26% avec mention bien ou très bien).
Plus près du 21ème siècle, c'est quand même dans les archives – celle de l'INA – qu'on retrouve les premières traces des femmes ingénieures. Et surtout qu'on peut mesurer l'obstination dont elles ont dû faire preuve face au machisme du monde des BTP. Pour lancer le débat, c'est Gisèle qui est convoquée, première femme ingénieure des travaux publics embauchée par le groupe Bouygues voilà 50 ans malgré les réticences tout à fait affichées de tous les corps de métier concernés. Entre « vocation des femmes » à changer les couches et impossibilité « physiologique » pour elles à travailler sur des chantiers, les lycéennes bretonnes ont tour à tour pouffé de rire et étouffé leurs réactions scandalisées. Heureusement elles étaient aussi là pour rencontrer des professionnelles d'aujourd'hui, ingénieures sur les chantiers autoroutiers ou dans les télécommunications, venues leur dire que les choses ont quand même changé. Et qu'il ne dépend que d'elles qu'elles évoluent encore !

Geneviève ROY