Au centre de tout, il y a des mots. Ceux des femmes victimes de violences conjugales, ceux qu’elles disent et ceux qu’elles taisent ; ceux qu’on peut leur adresser pour leur apporter du soutien ; ceux des professionnel.les qui les accompagnent.

Le 23 novembre, à l’auditorium de la Maison des Associations de Rennes, on a beaucoup parlé de la façon d’écouter ces femmes.

Avec l’ASFAD bien sûr mais aussi avec des étudiant.es d’Askoria, très présent.es dans l’amphi et la troupe du théâtre de l’Improbable

 

 

ASFAD1

 

Souvent, quand il y a violences, les mots manquent. On ne peut plus parler, communiquer, dire les choses et se dire soi-même. Mais après coup, quand les violences s’éloignent, après les coups, en somme, c’est à la parole qu’il faut donner toute la place.

Ce à quoi aspire Frédérique aujourd’hui c’est « ne plus avoir honte d’en parler haut et fort ». Pour elle, la reconstruction a commencé après une séparation mettant fin à une longue période de violences conjugales ; c'est le début d’une autre vie. « Il faut s’accrocher, même si c’est difficile » dit encore celle qui a « entamé une reconversion professionnelle pour ne plus dépendre de personne »

Avant de témoigner lors de la table ronde organisée par l’ASFAD, Frédérique était sur scène avec ses camarades du théâtre de l’Improbable, interprétant la pièce écrite à partir de témoignages de femmes victimes, Après Coups. Avec ses mots à elle, elle ouvrait le spectacle pour évoquer cette emprise qui des années durant la coupa de la vraie vie ; « ça vous maintient au sol ; vous vivez à côté ».

Eviter la culpabilisation des femmes victimes

Des mots des femmes, il en était aussi question sur les panneaux préparés par les femmes accueillies actuellement par l’ASFAD et dans les propos des deux psychologues invitées également à la table ronde.

ASFAD2« La femme n'est pas un objet », « je veux décider par moi-même », « la violence psychologique, ça tue à petit feu » disaient les unes, assises aux premiers rangs et revivant avec émotion leurs propres expériences. L’accompagnement, développaient Aude Ventéjoux et Elodie Rondin, « c’est d’abord une rencontre, la possibilité de se poser et de venir juste pour parler un petit peu ». Pour les deux professionnelles, psychologues cliniciennes, la première chose est d’être « entendue et accueillie ».

Avant les mots, il y a les coups et pour sortir des situations de violence, il faut parfois du temps. « Quand on est sous emprise – expliquait Aude Ventéjoux – on ne fonctionne plus de façon autonome » et ajoutait-elle comme « l'emprise génère beaucoup de culpabilité » il est important que l'entourage n'en rajoute pas sur le mode « pourquoi tu pars pas ? ».

D'où la difficulté exposée avec insistance par les intervenantes de savoir quand et comment être aux côtés des femmes victimes. En croyant bien faire, on peut parfois se montrer maladroit.es. « Pour ne pas rajouter à la souffrance – a-t-on retenu de cette soirée – il faut éviter toute forme de culpabilisation, ne pas être dans le jugement mais savoir apporter une parole réconfortante ».

Pour celles qui parviennent à s'extraire de ces situations de violences conjugales, la priorité est de « retrouver confiance en soi, mais aussi confiance en l'autre et d'arriver à renouer le lien social perdu ».

Geneviève ROY