Les Caisses d'Allocations Familiales, dont le métier est d'être à l'écoute des familles, proposent des « clubs parents », lieux d'échange et de partage pour toutes les familles.
Depuis deux ans à Rennes, une expérimentation un peu différente a été mise en place par la CAF d'Ille et Vilaine en partenariat avec le CIDFF 35. Sous le nom de « club parents solos » les familles monoparentales qui représentent plus de 30% des familles du département sont invitées à se retrouver chaque mois.
Pour Marie-Hélène Depauw du CIDFF et Dominique Alba de CAF et Familles, qui coordonnent le projet, l'objectif principal est d'abord de rompre l'isolement des femmes ; à une exception près, ce sont en effet des mères qui participent à ces rencontres.
Comment est née l'idée du club parents solos ?
Dans ses statistiques, la CAF 35 avait recensé une forte proportion de familles monoparentales. En 2011, elles représentaient 31% et les chiffres ont un peu augmenté depuis. Avaient également été identifiés des besoins particuliers en matière de ressources notamment et d'informations. Depuis 2008, il existe une convention entre la CAF et le CIDFF qui de son côté est en relation avec de nombreuses femmes parmi lesquelles des femmes seules avec leurs enfants. Après une première expérience stoppée en 2010 suite à des défections de participantes, un nouveau club a vu le jour à Rennes en janvier 2012. Nous sommes partis avec cinq personnes et aujourd'hui, nous avons une fréquentation de treize personnes, avec des participantes régulières et d'autres qui viennent en fonction de leur disponibilité ou du programme proposé.
Quels sont les objectifs du club parents solos ?
Il s'agit de proposer un lieu d'accueil où des personnes – hommes ou femmes – en situation de familles monoparentales puissent se retrouver pour échanger sur leurs questionnements en tant que parents mais aussi concernant d'autres préoccupations personnelles. A travers des rencontres mensuelles, l'objectif principal reste de créer du lien social parce que souvent on constate un grand isolement de ces personnes. Nous avons mis en place une charte pour gérer ce groupe et pour l'instant nous en sommes les deux animatrices mais l'objectif final est qu'à terme – un terme non arrêté – ce groupe se prenne en charge et devienne autonome et autogéré.
Qui sont les membres du club ?
Ce sont exclusivement des femmes. Nous avons reçu un homme dernièrement parce que le thème l'intéressait personnellement – il s'agissait d'une rencontre sur le rôle des pères – et les femmes étaient très contentes de cette mixité. Mais nos membres réguliers ne sont que des femmes. Elles viennent pour moitié de Rennes et pour moitié de l'agglomération dans un rayon de 15/20 kilomètres environ. Elles ont en moyenne une quarantaine d'années et des enfants qui vont de un an à 22 ans. Pour la plupart la séparation, le divorce ou le veuvage datent déjà un peu. Toutes les catégories socioprofessionnelle sont représentées, de l'archéologue à la bénéficiaire du RSA. Certaines sont en recherche de formation ou d'emploi, d'autres travaillent ou sont en invalidité. Quant aux enfants, certains connaissent leur père, d'autres non ; certains ont des droits de visite réguliers qui souvent se passent bien. Des familles ont connu des situations de violence et d'autres pas du tout !
Quelles sont les contraintes pour les participant-es ?
Les parents doivent venir seuls, sans leurs enfants. Il n'y a aucune contrainte d'assiduité ; certaines personnes sont assidues, d'autres moins. Mais nous avons une certaine exigence de ponctualité ce qui n'est pas toujours facile quand on est seul-e avec des problèmes de garde d'enfants notamment. Les rencontres ont lieu le lundi matin ; nous avons envisagé d'autres moments mais c'est difficile de trouver un jour et une heure qui conviennent à tout le monde. Le soir ou le week-end seraient souhaité par certaines personnes qui travaillent mais se pose alors la question de la garde des enfants... Certaines mamans n'hésitent pas à poser des RTT pour pouvoir venir le lundi matin !
Comment fonctionne le club ?
Dans un premier temps, nous avons fait un brainstorming pour identifier les demandes qui peuvent être différentes d'une personne à l'autre. Puis nous établissons un programme et pour chaque rencontre nous essayons d'avoir un-e intervenant-e pour répondre aux questions. Il ne s'agit pas d'un lieu de paroles, d'ailleurs nous ne sommes pas psychologues. Les personnes disent juste un bout de leur histoire en fonction du thème abordé. Souvent, par contre, entre elles, les mamans se donnent des conseils ou des éclairages. C'est plus un partage d'expériences. Et quand il le faut, nous réorientons vers des services ou des structures mieux adaptés.
Quels sont les thèmes abordés ?
Elles ont beaucoup de questions sur le rôle de parent, l'éducation, l'autorité, etc. mais nous abordons aussi des choses plus personnelles comme trouver du temps pour soi ou rechercher un emploi ; nous avons fait intervenir des personnes de l'UDAF notamment sur les questions économiques ou l'association médiation 35. Et puis nous apportons des moments de détente et de convivialité avec des ateliers d'écriture, de chi-kong ou de relaxation. Trois fois dans l'année, avec la participation possible des enfants, nous organisons aussi des sorties plus ludiques.
Quel bilan tirez-vous de ces deux ans passés ?
Nous sommes convaincues que ce genre d'actions aident les personnes à sortir de l'isolement parce que certaines reviennent de très loin quand même ! Donc, faire partie du club pour elles ça représente beaucoup ; elles ne sont plus dans des groupes de femmes victimes de violences, maintenant elles sont dans le groupe parents solos, il y a une nuance ! Nous avons l'exemple d'une maman de quatre enfants qui est arrivée avec beaucoup de problèmes ; elle ne sortait plus de chez elle et reconnaissait qu'elle ne parlait pratiquement plus à personne. Depuis elle a repris confiance en elle et en septembre, elle va débuter une formation avec l'AFPA. Ses enfants lui disent qu'elle a changé et ça la rend heureuse. D'ailleurs, physiquement, ça se voit !
Et puis, des choses nous échappent un peu et pour nous c'est très positif. Certaines femmes continuent à se rencontrer en dehors de nos rendez-vous de clubs ; certaines ont passé le nouvel An ensemble. Pour nous, là, c'est gagné !
Quels sont les prochains rendez-vous ?
La prochaine rencontre aura lieu le 26 mai sur le thème : être parent d'un enfant porteur de handicap. Puis une dernière rencontre est programmée en juin avec sans doute une initiation au chi-kong. Ensuite, il y aura une coupure pour les vacances d'été.
Propos recueillis par Geneviève ROY
Pour plus d'infos sur le club Parents Solos : CIDFF 35 - 21 rue de la Quintaine à Rennes - 02 99 30 80 89